YUSIIP est née des travaux de recherche de Adolphe AYISSI ETEME (2002 - 2007) qui portent sur l’étude des mécanismes d’intégration des systèmes d’information hétérogènes et incomplets afin de permettre l’aide à la décision en matière de développement urbain, dans un contexte de villes africaines marqué par un déficit en moyens, une concertation insuffisante entre les différents intervenants et des informations éparses, difficiles d’accès et pas très fiables. Le cœur de la plateforme fédératrice YUSIIP est son Entrepôt de Données Distribuées (EDD), qui capitalise les données et les connaissances liées aux thématiques urbaines suivantes : environnement, cadre de vie, transports, infrastructures, etc. Enfin, YUSIIP vise à offrir un outil de monitoring local permettant de suivre et de comparer l’évolution de la ville.
YUSIIP est un portail d’information sur la ville de Yaoundé. L’objectif poursuivi est de collecter, rassembler, au même endroit, des informations sur le développement urbain. L’internaute y trouvera des actualités, des chiffres clés classés par thématique, la documentation, des projets en cours et sera également réorienté vers les sites Web des différentes institutions partenaires. C’est un projet collaboratif (la production de l’information se fait en collaboration avec les autres acteurs urbains), évolutif (chaque jour, de nouvelles informations, indicateurs, thématiques, partenaires, fonctionnalités, s’ajoutent) et ouvert à tous (citoyens, administrations, politiques, organismes publics et privés, scientifiques, médias) en proposant des produits qui répondent à leurs différents besoins (les tableaux de chiffres et de graphiques pour comparer, les cartes pour la visualisation, les métadonnées pour la compréhension, etc.).
Les données urbaines sont les briques de base et des conditions nécessaires de mise en œuvre d’un développement urbain durable, innovant et dynamique. Les Conférences internationales HABITAT II (1996) et HABITAT III (2016) reconnaissent le fait qu’une utilisation efficace et effective des données urbaines disponibles est essentielle pour systématiser, professionnaliser et optimiser les villes. La maîtrise des données et des TIC (Technologies de l’Information et de la Communication) va permettre de gagner en performance sur des champs (thématiques) urbain(e)s. Par ailleurs, les données urbaines servent de socle à de nombreuses applications, à la production de nouveaux services et à la création d’une nouvelle relation avec les citadins. YUSIIP met en œuvre cette nouvelle façon d’organiser le partage des connaissances.
On ne dispose pas de connaissances globales sur les villes au Cameroun. Pour l’heure, les informations collectées sont circonscrites à leurs producteurs et/ou utilisateurs pour leurs activités quotidiennes. Elles sont donc éparses, difficiles d’accès et ne sont pas mutualisées. La tâche de YUSIIP est de construire une vision d’ensemble de la situation urbaine de la ville de Yaoundé, capitale politique de la République du Cameroun via la mise en place d’un Système d’Information Multi-Source (SIMS). L’idée est d’exploiter les données accumulées par les acteurs publics et privés impliqués dans la gestion et la planification urbaine pour améliorer le cadre de vie des populations. Il s’agit de mettre en place une plateforme qui puisse capitaliser les données urbaines et produire des indicateurs sur la base desquels vont être bâtis des tableaux de bord.
La tâche de YUSIIP consiste donc à rendre disponible les données produites par l’ensemble des acteurs : ministères, organismes publics et privés, CTD (Collectivités Territoriales Décentralisées), ONGs (Organismes Non Gouvernementaux), associations, réseaux sociaux, objets connectés. Le lien « Sources Données » donne accès à un répertoire électronique des données urbaines de Yaoundé (REDUY). L’accès en ligne au REDUY va éviter aux acteurs urbains actuels et nouveaux de refaire les mêmes choses, de chercher à collecter des informations qui existent par ailleurs. Il va permettre de rapprocher les sources de données qui ne l’étaient pas au départ, pour des usages toujours plus riches : Big Data, Open Data, etc. Et pourrait déclencher des réflexes créatifs chez les acteurs urbains: « Ah si j’avais ces données là, je pourrais… ».
YUSIIP traite différents champs urbains (environnement, cadre de vie, infrastructures, transports, éducation et formation, etc.) et met en œuvre des jeux de données. Parmi les principaux jeux de données figurent les données historiques, démographiques, locales, géo-référencées ou géospatiales, etc. Ces données seront utilisées par les journalistes, des chercheurs, les entreprises, les municipalités, mais aussi par l’ensemble de la population. Nous sommes de plus en plus encouragés par le fait que, les administrations publiques et les entreprises publiques et privées, qui ont d’abord réagi par une sorte de défiance vis-à-vis de la libération/partage des données, l’acceptent progressivement en vue de la constitution des écosystèmes de données. La mémoire urbaine synthétique va valoriser les données et va permettre l’émergence des applications inattendues, mais pertinentes.
En matière de développement urbain, il est important de s’assurer que les acteurs urbains et les citadins qui travaillent ensemble sur de nombreuses initiatives sachent où trouver les données et comment les utiliser. L’ouverture des données consiste à rendre les données aux utilisateurs, afin qu’ils puissent les utiliser librement, sans coût ni limitation. Cela générera un grand nombre de services nouveaux, et de nouvelles manières de travailler (coopération, partage d’informations, création d’applications publiques à partir des données, etc.). Nous convenons avec Mme Marieke Schenk que l’ouverture des données génère quatre types de valeurs : économique (c’est une source de profit potentiel pour les entreprises établies et les start-up), sociétale (sert à l’amélioration de la qualité de vie), démocratique (les populations peuvent voir ce qui se passe et interagir) et systémique (les écosystèmes de données bénéficient à tout un chacun).
Pour les villes camerounaises, la croissance des données constitue une opportunité face aux défis auxquels elles sont confrontées. Et notamment celui de faire mieux avec moins. Comme nous l’avons souligné, les données urbaines concernent des champs variés. Avec le développement exponentiel des technologies numériques, l’idée est de créer de la valeur à partir de grands volumes de données produites, stockées et analysées par les acteurs urbains. C’est dans cette perspective qu’on va : - bâtir une ville réellement agile et résiliente ; - développer des indicateurs de mesure de la performance des services et des politiques urbaines ; - réaliser des études croisées de données et produire des analyses prédictives. Les données urbaines créent une chaîne de responsabilité qui va du bureau du Délégué du gouvernement jusqu’aux ordinateurs des différents organismes publics et privés.
Les différents acteurs travaillent bien souvent sur des objets communs, mais ils ont malgré tout tendance à les traiter chacune de son côté, à reproduire chacune les mêmes bases de données. Si chaque acteur urbain faisait savoir aux autres de quelles données il dispose, différentes possibilités s’ouvriraient : limitation des redondances, comparaison/croisement des informations, bonne lisibilité de l’action urbaine, partage et collaboration. L’idée est de mettre en œuvre une approche partenariale impliquant un groupe d’acteurs urbains ainsi que les habitants pour coproduire ou co-construire, en synergie, les données et les mettre en ligne (« Communauté Intelligente » autour des données). La tâche étant d’amener les acteurs à considérer les données comme une ressource de la stratégie globale d’innovation, de performance et de suggérer que YUSIIP, soit intégrée dans un projet de ville.